C’est une histoire de courage. Donc de solitude. Une histoire de rapport de forces où les hommes ne sont pas les seuls à occuper le mauvais rôle, même s’ils sont plus nombreux du côté du manche. Un combat pour la justice et la vérité, maquillé en mensonge et déraison.
La Syndicaliste, film de Jean-Paul Salomé, inspiré de l’enquête éponyme de Caroline Michel-Aguirre (Stock, 2019), relate l’histoire vraie et sidérante traversée par Maureen Kearney. En 2012, cette responsable syndicale engagée chez Areva depuis plus de vingt ans prend connaissance d’un accord secret passé entre sa direction et des sociétés chinoises à qui il a été décidé de vendre le savoir-faire nucléaire français, ce qui implique à terme la suppression de milliers d’emplois chez le géant français du nucléaire.
Sensibilisée dès son enfance, en Irlande, à la cause des plus fragiles et des opprimés, soucieuse de défendre les salariés qui depuis des années lui ont accordé sa confiance, Maureen Kearney réclame en vain des explications à son nouveau PDG, Luc Oursel, qui dément tout contrat, bien que de nouveaux documents apportent la preuve du contraire. Malgré les intimidations de ce PDG colérique et violent, la responsable syndicale part au front pour dénoncer ce qui s’apparente à un secret d’État. Elle en parle avec Anne Lauvergeon, ex-PDG du groupe – dont on devinera peu à peu que le rôle semble avoir été ambigu –, contacte des ministres et autres personnes influentes, s’adresse à la presse….
Le matin du 17 décembre 2012, sa femme de ménage la retrouve dans sa cave, ligotée sur une chaise, le ventre scarifié d’un A – comme Areva, ou avertissement – un manche de couteau dans le vagin. Les faits, qui font suite à des coups de fils anonymes et des filatures intimidantes, ne laissent guère de doute : on veut la faire taire. Mais l’enquête vire très vite à son encontre : aucune trace chez elle du passage d’un intrus, le ruban adhésif avec quoi elle a été attachée vient de sa cave… Et si elle avait tout mis en scène et inventé le viol ?
Maureen Kearney sera à ce point effacée de la mémoire d’Areva que beaucoup, quelques années après, en ont oublié son identité, répondant comme on essaie de réveiller un vague souvenir : « Ah oui, la syndicaliste ? »
Isabelle Huppert joue le rôle de Maureen avec une justesse admirable. Le rythme de ce thriller presque plus doux que le cauchemar vécu par la vraie victime est haletant. A voir pendant qu’il est encore en salle !
Merci Juliette, quelle histoire! cela donne envie d'aller voir le film.